RSD
"Right Side Down" installation
Venice Biennale - Pavilion of Morocco - 2014
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SANS DESSUS-DESSOUS
SANS SOL : La mer de sable fait du désert un territoire sans sol. En mutation constante, le sol n’est jamais un repère, les habitants du désert à l’instar des marins utilisent les constellations comme les seuls guides géographiques stables. C’est ce rapport au sol, qui est au cœur de la proposition que nous faisons ici. Ce projet est une ville au-dessus et en-dessous du sol. Une ville suspendue et une ville creusée. Au-delà de sa dimension allégorique et critique, l’idée qu’une ville se vive dans sa verticalité plus que dans son plan horizontal est étrange et puissante. L’intériorité qui est créée entre la ville le jour (sous le sol) et la ville la nuit (sous le ciel) devient le cœur de l’espace commun/public. C’est une terre habitée qui se laisse traverser par le paysage.
HABITER L’INHABITABLE : Il n’y a aucune utilité à imaginer d’habiter le désert. Dans cette dernière frontière terrestre, aucune tension démographique ou économique ne rend plausible la colonisation humaine d’un territoire immense et hostile. L’urbanité est presque un contre-sens, dans ces lieux qui ont toujours été plus traversés qu’habités. Bien qu’inutile cette méditation sur ce que l’établissement humain a de plus primaire et de plus violent est une nécessité ontologique.
DESTINATION MANIFESTE : La question du désert au Maroc est éminemment complexe. Dernier territoire décolonisé, il est resté longtemps disputé et absent de la pensée architecturale et urbaine. Habiter le territoire, c’est le mesurer, le fiscaliser, le réticuler et finalement l’intégrer, dans ce que ce terme à de plus puissant. C’est donc une structure urbaine que nous avons cherché à fabriquer ici. Car la ville est le lieu de l’enracinement, de la civilisation et de l’urbanité. Faire une ville dans le désert n’est peut-être pas utile mais nécessaire.
GÉOGRAPHIE / GÉOMÉTRIE : 30°. La question de l’établissement humain et pionnier est toujours une tension, une recherche et un équilibre entre la géographie du grand territoire et la géométrie qui la confronte, la mesure et la contient. Ici nous avons commencé par regarder la géographie verticalement, comme une élévation, plutôt que dans les plis du plan et du sol. La gravité et la matière du sol fabriquent un territoire avec une inclinaison constante de 30° (l’inclinaison d’une dune de sable). Cette structure a défi ni un site d’une emprise de 125 m de côté et 36 m de haut, et son miroir, une excavation de 36 m de profondeur et de 125 m d’envergure. Ce volume imaginaire détermine une structure urbaine de grandeur conforme. Le projet est fabriqué par une série de corolles qui s’amenuisent à mesure que l’on s’élève vers la ville haute ou que l’on s’enfonce vers la ville basse. L’articulation entre ces plaques, qui tournent comme une hélice, fabrique les vides urbains qui du bas vers le haut et du haut vers le bas deviennent de plus en plus fi ns. Elle créé ainsi une gradation verticale du public, commun, privé et intime, et contrôle l’ensoleillement et la ventilation de ce vide urbain.
CENTRIPÈTE : Comment peut-on imaginer la dissémination verticale des programmes de la ville ? On habite sa coupe et on circule dans son élévation. Les valeurs d’usages et les contiguïtés urbaines s’organisent dans leur rapport au sol, au ciel, à la chaleur, à la lumière, à l’eau. Le rapport entre centre et périphérie disparaît. Le centre n’est plus un lieu habité, mais un volume autour duquel les anneaux qui constituent la ville tournent en se réduisant. Ce volume vide et poreux de 72 m de haut au plus et de 125 m de large est dans la ville. Il est contenu, contrôlé et s’oppose à l’immensité du désert.